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Le canalblog de Sylvain Rakotoarison
10 juin 2016

Hillary Rodham Clinton, par défaut ?

« Et mon cœur et ma raison réunis m’ont mise au service de l’intérêt public. Sur ma route, j’ai essayé de ne pas faire deux fois la même erreur, d’apprendre, de m’adapter et de prier pour avoir la sagesse de mieux choisir à l’avenir. (…) Garder l’Amérique sûre, forte et prospère, c’est faire un ensemble infini de choix, souvent avec une information imparfaite et des impératifs contradictoires. (…) Servir notre pays n’a jamais été pour moi un choix difficile. C’est le plus grand honneur de ma vie. » (Hillary Clinton, "Hard Choices", autobiographie sur la période 2008-2013 parue le 10 juin 2014).


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Ce mardi 7 juin 2016 a été un grand jour pour Hillary Clinton (68 ans), la candidate aux primaires du Parti démocrate pour les élections présidentielles américaines du 8 novembre 2016 : en gagnant largement la Californie (55,8%) et le New Jersey (63,3%), elle est désormais assurée de sa désignation comme candidate des Démocrates à la 47e Convention démocrate à Philadelphie, du 25 au 28 juillet 2016, en totalisant, selon ses calculs, 2 755 délégués. Il lui en fallait 2 383 pour obtenir la majorité absolue.

Elle l'a déclaré à Brooklyn, à New York : « Grâce à vous, nous avons franchi une étape importante. C'est la première fois dans l'histoire de notre pays qu'une femme est investie par l'un des grands partis. (...) La victoire de ce soir n'est pas celle d'une personne, elle appartient à une génération de femmes et d'hommes qui se sont battus et se sont sacrifiés et ont rendu possible ce moment. » (7 juin 2016). Deux jours après, Barack Obama a annoncé qu'il soutiendrait activement Hillary Clinton... un peu comme un renvoi d'ascenseur.

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En face d’elle, Bernie Sanders (74 ans) a fait preuve d’une indéniable endurance et persévérance, remportant 1 844 délégués, voulant faire campagne jusqu’au bout, même si c’était sans espoir, pour influencer au maximum les décisions de la Convention démocrate. Le dernier round aura lieu le 14 juin 2016 au District of Columbia (à Washington), où 20 délégués seront en jeu mais sans enjeu puisque la victoire d’Hillary Clinton est actée.

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Bernie Sanders, qui a rencontré Barack Obama à la Maison Blanche le 9 juin 2016, a déclaré la veille qu'il voulait rester jusqu'au bout, c'est-à-dire, jusqu'à la Convention pour tenter de convaincre les super-délégués. C'était ce qu'avait fait Ted Kennedy contre Jimmy Carter en 1980 (mais aucun des deux n'avait obtenu la majorité absolue des délégués) et c'est ce qu'avait voulu absolument éviter Hillary Clinton en 2008 : « J'avais en tête le souvenir de primaires acharnées où la bataille s'était poursuivie sans relâche jusqu'à la convention (...), et je ne voulais pas que l'histoire se répète. Ce ne serait bon ni pour notre parti ni pour le pays, donc j'allais rapidement annoncer publiquement que je soutenais Barack et faire campagne pour lui. » (Hillary Clinton dans "Hard Choices").

Bernie Sanders, à sa sortie de la Maison Blanche, sans dire en quoi il contribuerait à l'unité du Parti démocrate, a voulu rassurer en disant qu'il prendrait contact avec Hillary Clinton : « Je travaillerai autant que je pourrai pour être sûr que Donald Trump ne soit pas le Président des États-Unis. » (9 juin 2016).

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Ce qui aurait dû être pour elle une promenade de santé, une formalité oratoire, a été très laborieux et à la limite de la catastrophe électorale : Hillary Clinton a vaincu d’extrême justesse un candidat de 74 ans très axé à gauche et plébiscité par les étudiants. Un candidat anti-système qui pourtant était beaucoup apte à battre Donald Trump que sa rivale des primaires.

Car Donald Trump (70 ans la semaine prochaine), dès le début des primaires, a su montrer sa capacité à mener les primaires du Parti républicain, envoyant au tapis toutes sortes de candidats et en premier lieu le frère et fils de Président, Jeb Bush.

Le 26 mai 2016, Donald Trump avait annoncé qu’il avait conquis le nombre de délégués nécessaires pour obtenir l’investiture des Républicains, mais sans surprise puisqu’il restait seul dans la course : John Kasich avait renoncé le 4 mai 2016, Ted Cruz le 3 mai 2016 et Marco Rubio le 16 mars 2016. Aujourd’hui (les primaires républicaines se sont terminées le 7 juin 2016), Donald Trump aurait totalisé 1 441 délégués alors qu’il lui en fallait au moins 1 237 pour être désigné à la Convention républicaine à Cleveland du 18 au 21 juillet 2016.

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L’écart dans les sondages entre Hillary Clinton et Donald Trump s’est assez resserré ces dernières semaines et le 22 mai 2016, un premier sondage donnait Donald Trump gagnant face à Hillary Clinton. Celle-ci reste encore la favorite, mais pour combien de temps ? Car la campagne nationale sera difficile pour elle.

Tout les sépare. L’un est candidat anti-système, brut de décoffrage, un ovni en politique, tandis que l’autre, sénatrice de New York du 21 janvier 2001 au 21 janvier 2009, est de "l’etablishment", bien intégrée dans l’élite intellectuelle et politique. L'un est milliardaire et ne dépend financièrement d'aucun lobby, l'autre pourrait être influencée par ses généreux donateurs.

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Plutôt isolationniste au point de faire dire par certains commentateurs que Donald Trump serait prêt à traiter avec Bachar El-Assad et à reconnaître à la Russie de Poutine sa puissance, il ferait peut-être moins de catastrophes humanitaires que l’ingérence que promettrait Hillary Clinton pour maintenir les États-Unis dans le rôle de gendarme du monde. Elle avait elle-même voté, comme membre du Congrès, en faveur de la guerre en Irak, mais l’a amèrement regretté par la suite.

Voyant le danger venir des enjeux internationaux, Hillary Clinton n'a pas hésité, dans un discours prononcé le 2 juin 2016 à San Diego, à rappeler que la menace serait plutôt du côté de son adversaire : « Les idées de Donald Trump ne sont pas juste différentes, elles sont dangereusement incohérentes. Ce ne sont même pas vraiment des idées, ce sont juste une série de discours emphatiques bizarres, de règlements de compte personnels et de purs et simples mensonges. (...) Il loue des dictateurs comme Vladimir Poutine et se querelle avec nos amis, y compris le Premier Ministre britannique, le maire de Londres, la Chancelière allemande, le Président du Mexique et le pape. ».

Hillary Clinton, première femme candidate en position de gagner, elle est aussi la première ancienne Première dame à être en capacité de devenir Présidente des États-Unis. On mesure aujourd’hui à quel point son abnégation et son soutien d’épouse lors du scandale Monica Lewinisky (déclenché le 21 janvier 1998 par un article du "Washington Post" et renforcé par les dénégations de Bill Clinton lors de sa conférence de presse du 26 janvier 1998 : « Ces allégations sont fausses, et je dois retourner travailler pour le peuple américain ! ») aura forgé son caractère et préservé son avenir politique, puisqu’elle est soutenue depuis toujours dans sa carrière politique par son illustre mari.

Ce mardi 7 juin 2016 est donc une belle victoire pour Hillary Clinton, qui a pu recueillir presque 16 millions de votes. Elle revient de loin. Huit ans exactement auparavant, le 7 juin 2008, au National Building Museum à Washington, malgré 18 millions de votes, elle déclarait forfait face à son rival Barack Obama. Elle avait pourtant commencé la course comme favorite des sondages mais celui qui, aujourd’hui, termine son second mandat avait réussi à créer une vague en sa faveur : "Yes, we can !". Cette campagne de 2008 fut éprouvante : « Se présenter à la Présidence est une entreprise intellectuellement exigeante, émotionnellement épuisante et physiquement exténuante. » ("Hard Choices").

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Hillary Clinton a même su faire de ses échecs des arguments massues pour convaincre les autres : « Ma défaite me permettait (…) d’évoquer avec des dirigeants d’autres États ce que signifie le fait d’accepter un verdict intérieur difficile et d’aller de l’avant pour le bien de son pays. » ("Hard Choices").

En effet, le 1er décembre 2008, le nouveau Président Barack Obama a annoncé qu’il allait nommer Hillary Clinton au poste prestigieux de Secrétaire d’État (équivalent de Ministre des Affaires étrangères) : « Il m’a garanti que j’aurais un accès direct auprès de lui et que je pourrais le voir seul autant que nécessaire. Il a dit que je pourrais choisir ma propre équipe, même s’il allait faire certaines suggestions. (…) Le Président a pleinement respecté ses promesses. Il m’a donné toute liberté de choisir mon équipe,s’est fié à mon avis de principale conseillère en politique étrangère pour les décisions majeures qui arrivaient sur son bureau, et a tenu à me rencontrer souvent pour que nous puissions parler franchement. » ("Hard Choices").

Entre le 21 janvier 2009 et le 1er février 2013, elle a visité 112 pays, parcouru 1,6 million de kilomètres : « J’ai abordé mon travail avec une grande confiance dans les forces et la détermination durables de notre pays, et avec humilité face à tout ce qui échappe à notre savoir et à notre contrôle. J’ai œuvré à réorienter la politique étrangère américaine dans le sens de ce que j’ai appelé le "smart power", le "pouvoir intelligent". (…) Il existe dans le monde actuel peu de problèmes que les États-Unis peuvent régler seuls, mais il en existe encore moins qui peuvent être réglés sans eux. Tout ce que j’ai fait et vu m’a persuadé que l’Amérique reste le "pays indispensable". Mais je suis tout aussi convaincue que notre leadership n’est pas un dû. Nous devons le gagner à chaque génération. » ("Hard Choices").

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C’est de cette conviction qui l’anime qu’aujourd’hui, au destin déjà exceptionnel dans l’histoire politique des États-Unis, elle souhaite occuper les responsabilités suprêmes. Mais pas sans un préalable : rassembler et unifier.

Le 27 février 2016, dans les premières semaines des primaires démocrates, alors qu’elle venait de gagner brillamment celles de la Caroline du Sud avec 73,4% des voix, Hillary Clinton avait déclaré : « Malgré ce que vous entendez, nous n’avons pas besoin que l’Amérique soit forte à nouveau, l’Amérique n’a jamais cessé d’être forte. Mais nous devons vraiment faire de l’Amérique un pays uni. Au lieu de construire des murs, nous devons démolir des barrières. Nous devons montrer, par tout ce que nous faisons, que nous sommes vraiment ensemble pour le faire. ».

Ce sera exactement cela, l’enjeu des élections présidentielles américaines du 8 novembre 2016 dont la campagne risque d’être très dure. Et probablement aussi l’enjeu de l’élection présidentielle française des 23 avril et 7 mai 2017. Parvenir à incarner l’unité d’une nation, de son peuple, dans sa diversité, dans ses différences, dans ses contradictions, dans ses antagonismes. Et démolir les barrières !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (10 juin 2016)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Hillary Clinton en 2016.
Hillary Clinton en 2008.
Donald Trump.
La trumpisation de la vie politique américaine.
Mode d’emploi des élections présidentielles américaines.
Idées reçues sur les élections américaines.
Barack Obama.
Ronald Reagan.
Gerald Ford.
Jimmy Carter.
John Kennedy.
Al Gore.
Sarah Palin.
John MacCain.
Mario Cuomo.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20160307-hillary-clinton-US2016AB.html

http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/us-2016-hillary-rodham-clinton-par-181736

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2016/06/10/33932344.html





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