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Le canalblog de Sylvain Rakotoarison
28 juin 2020

Municipales 2020 (5) : la prime aux… écolos ?

Razzia sur les grandes villes : Lyon, Bordeaux, Grenoble, Strasbourg, Annecy, Poitiers, Tours, Besançon, Colombes… Attention à la tentation électoraliste de vouloir adopter des mesures écologistes extrémistes sur le plan national dans la foulée de cette vague électorale qui ne concerne qu’une certaine catégorie de la population, celle des grandes villes, celle plutôt aisée, en oubliant la population des périphéries !



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Ces élections municipales 2020 auront été atypiques jusqu’au bout. Le second tour des élections municipales qui s’est déroulé ce dimanche 28 juin 2020 a subi la même désaffection qu’au premier tour, pire même dans la mesure où c’était surtout dans les grandes villes qu’on revotait. Autour de 60% d’abstention, dont la cause n’est pas encore très certaine, entre peur du coronavirus, esprit délibérément ailleurs après une période difficile de confinement et cette volonté d’en finir, de retrouver les grands espaces, de prendre des vacances, notamment pour de nombreux salariés épuisés par les conditions de travail pendant la crise, et aussi les désillusions d’une nouvelle armée de demandeurs d’emploi… Tout est un peu différent d’avant.

Dans le détail, tous les partis pourraient y trouver leurs joies : LREM avec la réélection du Premier Ministre Édouard Philippe au Havre (environ 59%), qui se trouve en situation de grande force politique au sein de la majorité présidentielle (le renvoyer dans quelques jours serait incompréhensible), le PS avec la réélection d’Anne Hidalgo, la victoire à Nancy et à Montpellier (Michaël Delafosse), et le maintien dans de nombreuses autres villes, le RN évidemment avec l’élection à Perpignan de Louis Aliot qui pourrait concurrencer sérieusement son (ex ?) compagne pour la prochaine courses présidentielle, la droite parlementaire qui a gagné quelques villes (comme Lorient avec l’élection de Fabrice Loher) mais qui en perd aussi, et surtout, les écologistes.

Et ce sont bien les écologistes qui ont gagné les élections municipales de 2020, et gare aux conclusions de la Convention citoyenne pour le climat du lendemain. C’est clair que ceux qui ont voté ne représentent pas tous les Français : abstention massive et scrutin seulement dans les villes qui nécessitaient un second tour. Les écologistes ont gagné Lyon (c’est probablement l’événement de la soirée et l’échec complet de Gérard Collomb), aussi Annecy (à un dixième de % face au maire sortant), Strasbourg, Tours, Poitiers, Colombes, Besançon, Bordeaux (un choc pour le successeur d’Alain Juppé), Grenoble (réélection d’Éric Piolle avec 53,1% dans une quadrangulaire avec l'ancien maire LR Alain Carignon 23,4% et la députées LREM Émilie Chalas 12,5%), et à Lille, il s’en est fallu d’un cheveux (227 voix) pour que Martine Aubry tombât devant le mur écologiste (toutes les estimations sortie des urnes la donnaient d’ailleurs perdante).

La chute de Martine Aubry aurait même pu être un soulagement pour le PS qui aurait ainsi perdu une figure tutélaire du vieux monde. Et cette élection peu glorieuse extrêmement serrée est compensée par l’excellente mais désolante performance d’Anne Hidalgo qui peut être mise aussi sur le compte des écologistes avec qui elle s’était alliée au second tour. Compensée aussi par la réussite dans certaines villes, comme, hélas prévisible, à Nancy où Laurent Hénart a perdu face à Matthieu Klein, mais aussi dans certaines villes comme à Saint-Brieuc qui passe à gauche, la majorité sortante ayant été embouteillée par une multiplication de candidatures.

À Marseille, la situation est encore un peu floue, ce qui est certain, c'est la victoire aux voix de la liste de gauche menée par Michèle Rubirola, mais il est difficile de "l'étiqueter", entre une de gauche quasi-dure et une liste écologiste (elle est un peu des deux) et le système électoral un peu particulier de Marseille (concocté par Gaston Defferre pour garder la ville même sans majorité absolue des voix) pourrait même lui faire rater la mairie car il me semble que cette liste n'a pas la majorité absolue des sièges au conseil municipal.

Malgré le succès de Perpignan (et l'élection de Romain Lopez à Moissac), le RN n’a pas de quoi pavoiser dans ce scrutin qui ne lui était de toute façon pas favorable. Alors que le PS et la droite et le centre peuvent encore croire à une persistance nette dans la vie politique. À Toulouse, Jean-Luc Moudenc a finalement gagné avec un résultat moins serré que prévu.

Reprenons quelques villes gagnées ou maintenues à droite : Colmar (Éric Straumann), Mulhouse, Narbonne, Saint-Malo (Gérard Lurton), Aix-en-Provence (Maryse Jossains-Masini réélue), Limoges, Nice (Christian Estrosi réélu), Metz (la victoire de François Grosdidier a été cependant très serrée, avec moins de 200 voix d’écart sur le candidat de gauche).

Le PS peut regretter l’échec d’Alain Claeys (battu par une liste écologiste menée par une jeune femme de 30 ans pleine de dynamisme) à Poitiers, mais peut être heureux de maintenir toute une série de villes, à commencer par Paris, et aussi : Rouen, Rennes, Brest, Quimper, Le Mans (grande victoire de Stéphane Le Foll), Nantes (réélection de Johanna Rolland), Dijon (François Rebsamen avec 43,5%), sans compter la conquête de Nancy et de Saint-Denis (sur le PCF qui perd aussi Aubervilliers). Le PS voudrait même croire à un axe PS-EELV qui est complètement illusoire dans les conditions actuelles (hors Paris).

À La Rochelle, sans enjeu politique, le maire sortant Jean-François Fountaine a battu son rival Olivier Falorni avec 181 voix d’avance. À Orléans, l'ancien maire LR Serge Grouard a largement battu le maire sortant ex-LR passé à LREM Olivier Carré. À La Baule, l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy et conseiller régional Franck Louvrier (LR) a battu largement Jean-Yves Gontier (LREM).

Paradoxalement, même s’il est difficile de ne pas parler d’échec pour la majorité présidentielle (l’échec d’Agnès Buzyn à Paris, l’échec de nombreux candidats LREM dans des grandes villes comme Lyon, Lille, Bordeaux, etc., souvent dès le premier tour d’ailleurs) ne doit quand même pas faire oublier de belles réélections, celle de Gérald Darmanin à Tourcoing dès le premier tour, celle d’Édouard Philippe au Havre (Emmanuel Macron l’a félicité dans la soirée et ils se voient dès ce lundi 29 juin 2020 à 10 heures), celle aussi de François Bayrou à Pau, de Franck Riester, etc.

Très globalement, il est vraiment difficile de donner une tendance nationale, à l’exception de la victoire des écologistes dans les grandes villes, et un écologisme d'extrême gauche et de décroissance. À l’évidence, il y a eu un véritable besoin de renouvellement, des municipalités à droite sont tombées à gauche, d’autre à gauche sont tombées à droite, et quand la gauche persiste, c’est aussi par le truchement d’alliance avec les écologistes (comme à Paris, tandis que sans alliance, comme à Lille, le PS est très affaibli).

Ce qui est clair, c’est que recevoir la Convention citoyenne pour le climat à l’Élysée au lendemain des élections municipales n’était pas un hasard du calendrier : Emmanuel Macron voudrait finir son quinquennat comme étant le Président de la République qui a pris en compte l’enjeu climatique. Or, la victoire des écologistes aux municipales risque de précipiter des décisions parfois prises hors de toute considération rationnelle.

Il faut se rappeler qu’au lendemain des élections régionales de mars 1992, qui avaient vu les courants écologistes portés par 12% des électeurs (divisés en Génération écologie et Les Verts), le Président François Mitterrand, par électoralisme, avait pris des décisions stupides notamment en sabotant la grande compétence française sur la surgénération, condamnant la centrale de Creys-Malvile jusqu’à en faire qu’une pitoyable poubelle géante (honte à cet électoralisme !). Cela n’avait pas suffi à éviter la débâcle socialiste historique de mars 1993 qui a abouti au tragique suicide de Pierre Bérégovoy.

J’espère que le Président Emmanuel Macron saura raison garder face à cette pression écologiste qui va bientôt se décliner quand toutes les grandes villes. Le retour du balancier pourra être rapide quand les habitants des périphéries des grandes agglomérations (dont étaient principalement composés les gilets jaunes) s’apercevront qu’ils ne pourront plus du tout circuler en voiture dans leur ville centre. L’écologie punitive n’a jamais été un moyen pour convaincre les citoyens de l’urgence à prendre des décisions. Elle ne fera qu’augmenter les bataillons de ses opposants qui iront chercher ailleurs l’écoute qu’ils auront perdue auprès des plus rationnels.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (28 juin 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Municipales 2020 (5) : la prime aux… écolos ?
Municipales 2020 (4) : bientôt, la fin d’un suspense.
Municipales 2020 (3) : et le second tour arriva…
Municipales 2020 (2) : le coronavirus s’invite dans la campagne.
Municipales 2020 (1) : retour vers l’ancien monde ?
Les élections municipales de mars 2014.
Les élections municipales de mars 2008.
Scrutins locaux : ce qui a changé.
Le vote électronique, pour ou contre ?
Les ambitieux.

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http://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20200628-municipales-2020e.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/municipales-2020-5-la-prime-aux-225442

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/06/24/38391106.html






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