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Le canalblog de Sylvain Rakotoarison
13 novembre 2020

Le très discret Michel Robin

« Les gens se sont mis à me reconnaître dans la rue, c’était incroyable ! (…) Le pouvoir de la télévision est impressionnant. Je la regarde beaucoup, aujourd’hui, je cherche les films, les concerts et les opéras, mais cela n’est pas facile d’échapper aux idioties et à la pub. » (Michel Robin, le 4 mai 2020, "Générations").


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La télévision, accélératrice de notoriété. Ce fut le cas pour la série "Boulevard du Palais", diffusée entre 1999 et 2006. La gloire à 70 ans ! Du moins, auprès des téléspectateurs friands de séries policières…

Le comédien Michel Robin fête son 90e anniversaire ce vendredi 13 novembre 2020 (qui est par ailleurs un macabre anniversaire). Michel Robin, hélas, est très peu connu du grand public, enfin peu connu de nom, un nom en plus assez commun, probablement attribué à plusieurs homonymes, et pourtant, dès qu’on voit sa photo, on peut assez souvent le reconnaître : « Le public connaît mon visage, malheureusement, pas mon nom. » ("Le Progrès "). C’est la magie des seconds rôles. Certains accompagnent de nombreux films sans faire de vague, mais sans eux, pas de petit sourire, de petite cerise sur le gâteau, de bouée rouge sur un tableau de Turner…

J’adore ses prestations, en peu comme un cueilleur de champignons jaloux de garder secret son coin à champignons. L’impression d’avoir accès à quelques pépites hors des sentiers battus. Et en même temps, il y a des champignons pour tout le monde, l’idée d’une certaine injustice des médias qui n’éclairent que les grandes stars et qui oublient les travailleurs méticuleux qui rendent une production aussi captivante. Michel Robin a des allures de grand-père bienveillant, joyeux, respectueux, tolérant, je n’ose pas dire gentil.

Né à Reims, Michel Robin doit sa vocation de comédien à son frère aîné qui est mort récemment : « Grâce à lui, j’ai commencé le théâtre à 7 ans. On adaptait des farces du Moyen-Âge. » ("Générations"). Le voici en scène chez les scouts, lors des longues soirées autour d’un feu. Refusant de prendre la succession de son père dentiste, il a commencé des études de droit à Bordeaux. Il y avait une compagnie de théâtre amateur et après quelques rôles, on lui a conseillé de "monter à Paris".

Le voici en train de jouer avec Roger Planchon pendant sept ans : « Il m’a tout appris et en même temps, rien appris. Lorsque je suis arrivé à Lyon, j‘étais relativement âgé, 28 ans, en tout cas, plus âgé que lui. Je crois avoir un don pour le théâtre. Le métier d’acteur ne s’apprend pas à l’école, mais sur le tas, en travaillant beaucoup. Il n’y a pas longtemps que je l’ai compris. Roger m’a appris le respect des textes. Mais avec lui, comme avec les autres, j’ai presque toujours été abonné aux petits rôles. » ("Le Progrès" du 7 janvier 2015, propos recueillis par Antonio Mafra). Ce fut durant cette période lyonnaise qu’il a sympathisé avec Jean Bouise et avec bien d’autres.

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Je n’ai pas eu la chance de voir Michel Robin jouer au théâtre mais c’est bien sûr son métier principal, notamment de 1994 à 2011 (à partir de 63 ans !) à la Comédie-Française, dont il est devenu le 495e sociétaire le 1er janvier 1996. Il a d’ailleurs eu la reconnaissance de la profession avec une nomination pour le Molière en 1989 et surtout, consécration, l’attribution d’un autre Molière pour les seconds rôles en 1990 pour "La Traversée de l’hiver", pièce de Yasmina Reza créée le 6 octobre 1989 à Orléans, dans laquelle Michel Robin jouait le rôle d’une personne ennuyeuse et isolée.

Michel Robin a joué dans plus d’une centaine de pièces de théâtre de 1958 à 2015. Autant de pièces, sans compter les presque cent cinquante films, montrent la forme solide et assidue du comédien. À ses débuts, il était donc dans la troupe de Roger Planchon, puis la compagnie Renaud-Barrault (notamment pour "Fin de partie" de Beckett, œuvre qu’il adore). Parmi ses prestations, on peut citer avec vertige les auteurs suivants : Dürrenmatt, Alfred de Musset, Molière, Shakespeare, Alexandre Dumas, Gogol, Brecht, Gorki, Schiller, Remo Forlani, Beckett, Nathalie Sarraute, Sean O’Casey, Ionesco, Ibsen, Boulgakov, Théophile Gautier, Bernanos, Yasmina Reza, Roger Caillois, Thierry Maulnier, Jean Genet, Jean Giraudoux, Tchekhov, Victor Hugo, Alain Decaux et André Castelot, Marivaux, George Bernard Shaw, Pierre-Henri Loÿs, Feydeau, Euripide, Edmond Rostand, Beaumarchais, Alfred Jarry, etc.

La dernière pièce qu’il a jouée en 2014-2015, ce fut "Les méfaits du tabac", de Tchekhov, dans une mise en scène de Denis Podalydès. C’était une pièce qu’il connaissait bien puisqu’il l’avait jouée étudiant à Bordeaux dans le théâtre amateur et qu’il l’a jouée aussi au moment de son audition au Cours Florent.

Parallèlement, en plus de ses quelque quatre-vingt-dix participations dans des productions télévisées, Michel Robin a joué dans une soixantaine de films entre 1966 et 2018. Souvent, ce sont des petits rôles qui donnent une réelle valeur ajoutée au film. Par exemple, il joue le père de la fille enlevée dans "La Chèvre" de Francis Veber (1981), par ailleurs celui qui embauche Gérard Depardieu et Pierre Richard pour aller la rechercher des griffes des ravisseurs. Dans "L’invitation" de Claude Goretta (1973), Michel Robin est le petit employé qui fait un héritage, plongé dans une aventure sociale aux côtés de Jean-Luc Bideau. Il devient un malheureux touriste dans un voyage (dés)organisé aux States d’une compagnie en faillite dans "Restons groupés" de Jean-Paul Salomé (1997).

On peut aussi citer ses apparitions dans "L’Aveu" de Costa-Gavras (1970), "Le mur de l’Atlantique" de Marcel Camus (1970), "Les mariés de l’an II" de Jean-Paul Rappeneau (1971), "L’affaire Dominici" de Claude Bernard-Aubert (1973), "Les aventures de Rabbi Jacob" de Gérard Oury (1973), "Verdict" d’Alain Cayatte (1974), "Le jouet" de Francis Veber (1976), "L’hôtel de la plage" de Michel Lang (1978), "Les petites fugues" d’Yves Yersin (1979), "Le marginal" de Jacques Deray (1983), "Merci pour le chocolat" de Claude Chabrol (2000), "Le fabuleux destin d’Amélie Poulain" de Jean-Pierre Jeunet (2000), "Un long dimanche de fiançailles" de Jean-Pierre Jeunet (2004), etc.

Michel Robin a quitté la scène en 2018. Depuis lors, il réside dans un appartement faisant partie d’une résidence pour personnes âgées dans les Yvelines : « La plupart [des résidents] demeurent un mystère pour moi. Ils ne parlent pas, ne s’intéressent à rien. Je me demande quelle vie ils ont eue ! » ("Générations"). Sa fille vient le voir souvent, et on lui livre des plats cuisinés avec les précautions d’usage en période de pandémie de covid-19.

L’homme est encore un grand séducteur, même s’il reste humble devant l’amour : « Il n’y a pas grand-chose à raconter. J’étais tellement timide, que j’étais le Poulidor de l’amour. J’arrivais toujours deuxième ! » avouait-il au magazine suisse "Générations" le 4 mai 2020, en plein confinement, interrogé par Véronique Châtel. Poulidor qui est mort le jour de son anniversaire l’an dernier. Et d’affirmer son vrai âge : « J’assume mon âge, même si je ne réalise pas que j’aurai 90 ans. J’ai toujours 5 ans d’âge mental. Je préférerais avoir 50 ans, mais j’aime être vivant. Je continue de rêver, d’écouter de la musique (…), surtout la nuit, toutes fenêtres ouvertes. J’ai du mal à me projeter au-delà de 95 ans. Il me semble que, alors, je serai peut-être quand même vieux. ». Souhaitons-lui une jeunesse qui perdure !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (08 novembre 2020)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Alain Delon.
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Marlène Jobert.
Jean-Michel Folon.
Henri Verneuil.
Wladimir Yordanoff.
Jean-Luc Bideau.
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Maureen O'Hara.
Ennio Morricone.
Zizi Jeanmaire.
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Suzanne Flon.
Michel Piccoli.
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Brigitte Bardot.
Charlie Chaplin.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20201113-michel-robin.html

https://www.agoravox.fr/culture-loisirs/culture/article/le-tres-discret-michel-robin-228606

https://rakotoarison.canalblog.com/archives/2020/11/03/38628204.html






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