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Le canalblog de Sylvain Rakotoarison
10 décembre 2021

Nouvelle-Calédonie : jamais deux sans trois !

« L’avenir, c’est la dernière étape de l’Accord de Nouméa. Un troisième référendum est possible. C’est à vos élus du Congrès de le décider. L’État, fidèle à sa parole, se tient prêt à l’organiser si c’était leur choix. » (Emmanuel Macron, le 4 octobre 2020).



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Pour la troisième et dernière fois, la Nouvelle-Calédonie va voter ce dimanche 12 décembre 2021. Il s’agit d’un dernier référendum pour l’indépendance. Le processus est long et la pandémie de covid-19 n’a pas facilité les choses.

Selon l’Accord de Nouméa signé le 5 mai 1998 et initié par le Premier Ministre Lionel Jospin (inscrit dans les articles 76 et 77 de la Constitution), trois référendums étaient prévus sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Plus exactement, un référendum d’autodétermination était prévu entre 2014 et 2018, suivi éventuellement de deux autres.

La question, négociée âprement le 28 mars 2018 par le Premier Ministre Édouard Philippe et les différents groupes politiques néo-calédoniens, est : "Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?".

Le corps électoral est particulier puisque ne peuvent voter que les habitants de Nouvelle-Calédonie installés depuis au moins 1994 (et leurs descendants). Par conséquent, ceux installés il y a moins de 27 ans sont hors du cadre électoral (sont ainsi exclus environ 36 000 électeurs potentiels).

Deux référendums ont déjà eu lieu : le 4 novembre 2018, le "non" l’a nettement emporté avec 56,7% et une forte mobilisation (81,0% de participation) et le 4 octobre 2020, le "non" l’a aussi emporté, mais de manière plus serrée, avec 53,3% et avec une plus forte participation, 85,7%. Les groupes indépendantistes du Congrès (assemblée délibérative de la Nouvelle-Calédonie) ont alors demandé le 8 avril 2021 au gouvernement français l’organisation d’un troisième référendum.

Le Premier Ministre Jean Castex a réuni les dirigeants néo-calédoniens du 25 mai au 3 juin 2021 à Paris pour évoquer cette nouvelle échéance. Le gouvernement a fixé au 12 décembre 2021 la tenue de ce nouveau référendum. L’Accord de Nouméa convient que tout doit être terminé avant fin 2022 (avenir, statuts). Les indépendantistes voulaient la tenue de ce référendum après l’été 2022, pour éviter un télescopage avec les élections nationales françaises du printemps 2022. Au contraire, les loyalistes voulaient son organisation le plus tôt possible afin de clore cette période d’incertitude institutionnelle.

En effet, ces référendums à répétition ont particulièrement freiné l’activité économique de l’archipel en plongeant tous les acteurs économiques dans l’incertitude depuis quatre ans. La situation économique est à l’attentisme, les conséquences étant très différentes selon que la Nouvelle-Calédonie reste française ou pas. Les investisseurs attendent donc.

Mais la crise du covid-19 est également arrivée en septembre-octobre 2021. Alors que la Nouvelle-Calédonie avait été plutôt épargnée jusque-là (les Néo-calédoniens font très attention aux épidémies par culture historique, à la suite d’une épidémie dans les années 1920, et ils ont même voté l’obligation vaccinale le 3 septembre 2021), le bureau politique du FLNKS a pris la décision, le 6 octobre 2021, de demander le report du référendum en raison de la crise sanitaire : « Si , aujourd’hui, le bureau politique du FLNKS demande le report de cette date, c’est surtout parce qu’il nous semble malvenu de faire campagne au sein d’une Calédonie qui sortira meurtrie et divisée de cette crise sanitaire. » (Jean Creugnet le 7 octobre 2021). Le FLNKS a évoqué le risque de participation faible à cause du covid-19 et donc, la possibilité d’un scrutin contestable, et l’impossibilité de faire campagne.

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La situation s’est radicalisée en quelques jours. Alors que le Ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu venait de rencontrer tous les protagonistes politiques en Nouvelle-Calédonie, à son retour à Paris, il a découvert le 20 octobre 2021 que le FLNKS a finalement appelé à boycotter le scrutin. La raison, le mois de confinement (depuis le 7 septembre 2021) et les 260 décès dus au covid-19 (pour une population estimée en 2019 à 271 000 habitants, soit environ 0,1%). Les indépendantistes ont aussi menacé de ne pas participer aux négociations après le référendum. Le 9 novembre 2021, ils ont affirmé qu’ils ne respecteraient pas le résultat du référendum s’il était maintenu.

Mais la crise sanitaire a bon dos : elle ne fait que rappeler que la Nouvelle-Calédonie sans la France ne serait pas capable de lutter efficacement contre la pandémie (tests, vaccins, médecins, etc.), ce qui désavantagerait évidemment les partisans de l’indépendance. Beaucoup parlent ainsi d’instrumentation du covid-19 pour reporter le référendum pour des raisons politiques, car le contexte leur est défavorable.

Le 12 novembre 2021, le gouvernement français a maintenu la date du 12 décembre 2021 en raison de l’amélioration de la situation épidémique. La situation a été confirmée le 30 novembre 2021 avec la poursuite de la baisse du taux d’incidence, l’absence de décès depuis le 21 novembre 2021 et parallèlement, une couverture vaccinale très large.

Ce maintien du référendum ravit donc les loyalistes qui veulent en terminer avec ce cycle de trois référendums qui paralyse toute l’économie néo-calédonienne. La participation va donc être le principal critère de succès du référendum dont l’issue paraît peu incertaine (en faveur du maintien dans la République). L’observation dans les différentes provinces donnera aussi une indication cruciale sur la nature et l’ampleur de l’abstention : est-elle due à la crise sanitaire ou au boycott des indépendantistes ? Cette analyse par province devrait permettre de répondre à la question.

Dans les arguments, le choix ne serait pas la France ou l’indépendance, mais plutôt la France ou la Chine qui viendrait reprendre l’influence française (du reste comme Madagascar aujourd’hui). Pendant la campagne du congrès de LR, Xavier Bertrand avait été scandalisé par la neutralité du gouvernement français dans ce référendum, considérant que l’intérêt stratégique de la France était de garder une présence et une influence dans le Pacifique. Mais cette neutralité institutionnelle, voulue pour rendre incontestables les résultats du référendum, n’empêche pas l’engagement de la majorité actuelle dans le camp du "non" à l’indépendance, en particulier de François Bayrou. D’autres personnalités comme Bruno Retailleau (LR) et Jean-Christophe Lagarde (UDI) ont fait également la campagne contre l’indépendance. Probablement qu’on posera une question sur le sujet au Président Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse du jeudi 9 décembre 2021. Dans son allocution télévisée du 4 octobre 2020, le chef de l’État disait : « Il nous revient tous ensemble de préparer cet avenir. Le moment est en effet venu de répondre et d’appréhender les conséquences concrètes de tous les scénarios. Et l’État, sans se départir de son impartialité, garantie par les Accords de Matignon, s’engagera dans cette voie. ».

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Dans tous les cas, une longue période de discussions et concertations aura lieu après le référendum, soit le "oui" à l’indépendance, et sera rédigée une Constitution qui sera ensuite approuvée par référendum, soit le "non" et dans ce cas, un nouveau statut institutionnel pour la Nouvelle-Calédonie sera négocié puis ratifié par référendum. Entre autres réformes, le corps électoral qui est beaucoup trop restreint que les droits élémentaires des nationaux (non seulement un citoyen installé après 1994 ne peut voter au référendum, mais aujourd’hui, il ne peut même pas choisir ses représentants au Congrès).

Le risque est donc que tout ce processus de résolution pacifique qui a commencé avec les Accords de Matignon du 26 juin 1988 (il y a trente-trois ans) soit remis en cause par le boycott injustifié des indépendantistes. De toute façon, la crise sanitaire a montré l’importance de la présence française et ce qui était valable en 2021 le sera en 2022, cela ne changera pas vraiment, en quelques mois, la Nouvelle-Calédonie qui ne se transformera pas de manière à ne plus avoir besoin de la France. La mauvaise foi des indépendantistes peut donc révéler tout simplement que la Nouvelle-Calédonie se sent beaucoup mieux dans le cadre de la République française que toute seule au milieu du Pacifique.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (05 décembre 2021)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Nouvelle-Calédonie : jamais deux sans trois !
Bernard Pons.
Nouvelle-Calédonie : le vent du boulet ?
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 4 octobre 2020 sur la Nouvelle-Calédonie.
Résultats du référendum du 4 octobre 2020 en Nouvelle-Calédonie.
Nouvelle-Calédonie : bis repetita ?
Jean-Marie Tjibaou fut-il un martyr de la cause kanake ?
Nouvelle-Calédonie : un timide oui pour la France.
Allocution télévisée du Président Emmanuel Macron le 4 novembre 2018 sur la Nouvelle-Calédonie.
Résultats du référendum du 4 novembre 2018 en Nouvelle-Calédonie.
Paris à l’écoute de la Nouvelle-Calédonie.
Discours du Président Emmanuel Macron le 5 mai 2018 à Nouméa.
Discours du Premier Ministre Édouard Philippe le 5 décembre 2017 à Nouméa.
L’assaut de la grotte d’Ouvéa selon Michel Rocard.
Jacques Lafleur.
Dick Ukeiwé.
Edgard Pisani.

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https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20211205-nouvelle-caledonie.html

https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/nouvelle-caledonie-jamais-deux-237821

http://rakotoarison.canalblog.com/archives/2021/12/07/39251658.html








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