Diana, la Princesse du peuple
« C’est un point à retenir que de toutes les ironies au sujet de Diana, peut-être la plus grande était celle-ci : une fille du nom de l’ancienne déesse de la chasse était, en fin de compte, la personne la plus chassée de l’ère moderne. » (Charles Spencer, frère de Diana, le 6 septembre 1997 à Londres).
Chassée par la presse et les médias, bien sûr. C’est un peu comme les saisons, revoici fleurir des documentaires sur la princesse Diana Spencer, mère de la descendance de la reine Élisabeth II. Logique du calendrier. Elle est hélas morte dans un accident de voiture à Paris, sous le pont de l’Alma, il y a vingt-cinq ans, dans la nuit du 30 au 31 août 1997.
J’étais, le 31, il me semble, à Perpignan avec des amis, et j’ai été très étonné que cette nouvelle, affreuse en elle-même, ait pu autant émouvoir certaines de mes amies (femmes) qui n’avaient pourtant pas de relations particulières avec la famille royale. Elles ne lisaient pourtant aucun magazine sur les princesses et autres têtes couronnées, mais elles étaient pourtant choquées.
Le maître mot était l’identification, et Lady Di était une sorte d’héroïne sortie du ciel mais qui avait des combats très concrets, en particulier contre le sida. Elle a contribué à ne pas isoler socialement les personnes séropositives (Bill Clinton a écrit en décembre 2001 : « En 1987, lorsqu’une grande partie de la population croyait qu’il était possible de contracter le sida par de simples contacts, la princesse Diana s’est assise sur le lit d’un malade du sida et lui a serré la main. Elle a montré au monde que les séropositifs ne méritaient pas l’isolement mais la compassion. Ces prises de position ont contribué à faire évoluer l’opinion mondiale, à donner espoir aux séropositifs et à sauver des vies. »).
Aussi son combat contre les mines antipersonnel au cours de ses voyages humanitaires, en particulier en Angola en janvier 1997 (le Ministre britannique des Affaires étrangères Robin Cook a affirmé en 1998 : « Tous les membre de cette assemblée [la Chambre des Communes] seront reconnaissants à la princesse de Galles de nous avoir révélé le coût humain des mines antipersonnel. La meilleure façon de prendre en compte son action ainsi que celle des ONG qui ont lutté contre les mines, c’est de voter pour le projet de loi et d’ouvrir la voie à l’interdiction mondiale des mines. ».
Elle a soutenu bien d’autres causes comme celle des sourds en faisant l’apprentissage du langage des signes britannique. Mais Diana Spencer a surtout été populaire parce qu’elle représentait la figure d’une femme trompée, dupée par son mari. Elle s’est mariée le 29 juillet 1981 avec le Prince Charles au cours de festivités retransmises mondialement. Elle avait tout juste 20 ans (née le 1er juillet 1961) et son mari de prince héritier en avait 32. Elle a fait son job de princesse et de belle-fille d’une reine pas facile, elle s’est prêtée aux jeux des médias, de la représentation, des actions caritatives, elle a mis au monde deux garçons, William (le 21 juin 1982, il vient d’avoir 40 ans) et Harry (le 15 septembre 1984), bref, elle a donné à la famille royale la descendance qu’elle attendait (et la génération a continué par la suite, la monarchie est sauvée !). Kate Middelton, l’épouse du prince William, a eu cette année 40 ans (le 9 janvier 2022), elle est donc bien plus âgée que les 36 ans de Diana à sa mort : décidément, la charisme planétaire d’une telle princesse n’est pas automatique.
Mais probablement qu’elle avait le mauvais rôle dans ces jeux affectifs des hommes comme que le décrivait François Mitterrand, selon Roland Dumas, c’est-à-dire que les hommes ont besoin de « trois femmes : une pour l’intelligence, une pour les enfants et l’autre pour le plaisir ». Je ne sais pas le rôle de Camilla Parker Bowles auprès du Prince Charles, mais il semble patent que Diana Spencer n’avait pas forcément le meilleur rôle, celui de "mère" pour avoir des enfants et des descendants. Isolement, dépression, humiliation, incompréhension. Le rose des paillettes n’est pas forcément d’un éclat véritable.
C’est certainement aussi par la manière dont elle fut traitée par la famille royale, avant puis après la séparation officielle le 9 décembre 1992, puis le divorce le 28 août 1996, que Diana a été populaire. La réaction initiale de la reine à la mort de Diana n’a pas été à la hauteur de la ferveur populaire. Elle s’est achetée les jours suivants. On peut à cet égard recommander deux ou trois films sur le sujet, un sur le mode parodique : "Palais royal !" de Valérie Lemercier (sorti le 23 novembre 2005), et un autre un peu plus sérieux : "The Queen" de Stephen Frears (sorti le 15 septembre 2006), également "Diana" d’Oliver Hirschbiegel (sorti le 20 septembre 2013).
Pendant les dernières années de sa vie, Diana a utilisé son attractivité médiatique contre la famille royale, mais ce petit jeu s’est aussi retourné contre elle. Son échappée avec Dodi Al-Fayed, producteur de cinéma et fils d’un milliardaire égyptien propriétaire du Ritz à Paris et également cousin du journaliste saoudien Jamal Khashoggi (assassiné au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul), qui allait être la dernière, devait être médiatisée pour provoquer la jalousie de son ancien amant, le chirurgien Hasnat Khan dont la famille pakistanaise a refusé la liaison (car Diana n’était pas musulmane), et le faire revenir vers elle (tandis que la presse expliquait qu’elle allait se marier avec Dodi Al-Fayed).
De retour de vacances en Sardaigne, le couple très récent a été piégé par les photographes à Paris, dès la sortie de l’aéroport du Bourget. L’accident sous le pont de l’Alma était inévitable dès lors que la voiture roulait à plus de 120 km/h, peut-être jusqu’à 155 km/h, alors que la vitesse était limitée à 50 km/h. Les voies sont étroites à cet endroit de Paris. Surtout, des piliers sont positionnés au milieu de la chaussée, séparant les deux sens.
Le professeur Claude Got rappelait le 30 mai 2011 que l’accident qui a tué trois personnes (Diana, son amant et le chauffeur) avait eu au moins quatre causes : la vitesse excessive, le chauffeur avec une alcoolémie excessive (et aussi des médicaments dans le sang), l’absence de barrière de protection pour éviter les chocs contre les piliers (un séparateur médian en béton aurait probablement sauvé la princesse), ainsi que l’absence de ceinture de sécurité mise par aucun des quatre passagers.
La princesse est morte quelques heures après l’accident, après son transfert à la Pitié-Salpêtrière. Sa disparition a provoqué une émotion très forte au Royaume-Uni (et au-delà), que Tony Blair, le Premier Ministre britannique, a bien comprise. Les funérailles ont eu lieu le 6 septembre 1997 à Londres avec les honneurs nationaux, en présence de nombreuses personnalités, en particulier de Tony Blair, James Callaghan, Margaret Thatcher, John Major, Edward Heath, Hillary Clinton, Henry Kissinger, Bernadette Chirac, Juan Carlos, Constantin II de Grèce, Nelson Mandela, etc.
Comme dans tout événement très émotionnel, des théories du complot ont fleuri après la mort de la princesse. Mohamed Al-Fayed, le père milliardaire de l’amant, a voulu croire à un double assassinat (contre Diana et contre son fils), mais sans en apporter la preuve, d’autres évoquent une princesse enceinte, la mystérieuse disparition de la Fiat Uno blanche qui avait été heurtée par la voiture de la princesse sous l’Alma (son conducteur ne s’est jamais fait connaître et n’a jamais été retrouvé), et même, comme c’est le cas pour Elvis Presley, l’idée que Diana et son amant vivraient encore aujourd’hui dans un havre de paix, reculé et loin de toute la pression médiatique.
Dans cette dernière hypothèse, plutôt heureuse (certaines personnes ont besoin de "rêver"), on y trouve aussi Marilyn Monroe et même Michael Jackson. Mais au fond, tous ceux qui disparaissent, même les plus humbles, sont peut-être aujourd’hui dans ces petits îlots paradisiaques de sérénité et de paix, loin du tracas du quotidien, profitant du petit bonheur d’avoir été vivants et surtout, d’avoir été humains…
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Sylvain Rakotoarison (27 août 2022)
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